Rions ensemble (2) : une notice initialement prévue pour Le Dictionnaire de la mort (Larousse, coll. In Extenso, 2010)...
Death metal
La
naissance de ce sous-genre radical de heavy metal pourrait bien être liée à un…
décès. A la fin de l’année 1983, à San Francisco, jadis berceau du Flower
power, un adolescent nommé Barry Fisk, 17 ans, chanteur d’un groupe de metal
anonyme, se tire une balle dans la bouche par dépit amoureux. Son suicide
conduit ses membres à le remplacer par un certain Jeff Becerra, jusque là
bassiste. Ce dernier, influencé par la voix rocailleuse d’un autre chanteur
bassiste bien plus célèbre, Lemmy Kilmister de Motörhead, ajoutera au tempo
rapide et à la dominante sataniste alors en vogue sur la côte ouest un type de
chant guttural et caverneux qui en constituera la pierre angulaire. La démo que
la formation, entretemps rebaptisée Possessed, sort en 1984, intitulée
« Death metal », suit toutefois d’un an celle d’une autre démo,
« Dead by metal » du groupe américain Death, originaire d’un autre
Etat du soleil, la Floride, et coïncide avec la sortie, en Europe cette fois,
d’une compilation de groupes de speed et de thrash metal allemands appelée
« Death metal » - qui n’a d’ailleurs de death metal que le nom.
Il
faudra attendre 1987 pour voir arriver le premier album d’un genre à part
entière, « Scream bloody gore » de Death, avec tout ce qui fait sa
singularité : chant guttural (le « growl » ou « Cookie
Monster vocal », en référence au doux timbre de voix de la marionnette
éponyme de Sesame Street),
guitares rythmiques accordées en ré plutôt qu’en mi, double grosse caisse,
percussions rapides, chant narratif et descriptif, primauté accordée aux gammes
mineures harmoniques plutôt qu’aux mélodiques... Et bien sûr, un seul
thème : la mort.
Si
la Faucheuse a toujours été un des thèmes favoris des groupes de hard rock (de
Black Sabbath à Slayer en passant par Iron Maiden), sa fascination constitue
l’unique source d’inspiration des formations de death metal,
notamment dans ses manifestations physiologiques, putréfaction, spasmes
d’agonie, rigor mortis et autres
joyeusetés tournant autour de la charogne, ainsi que l’attestent certains
noms de groupes : Carcass, Pestilence, Cannibal Corpse… Là où son faux jumeau,
le black metal, plus rapide, d’origine anglaise, souvent sans voix
« growlée », et adepte de « corpse painting », préfère se
vouer à Satan ou aux mythes païens. Pour cette raison, l’imagerie adoptée par
le death metal est plus « gore » (voire article) et cinématographique
que métaphysique, notamment à travers sa prédilection pour les tueurs en série,
même si certains groupes, à l’image de Death, développeront un embryon de
philosophie nihiliste déjà ardemment couvé par le mouvement gothique. Si
l’athéisme y est souvent revendiqué (Atheist ou Nihilist sont des piliers du
genre), il ne pourra empêcher l’éclosion ultérieure, mais rare, de groupes de
death metal chrétiens comme Mortification ou Living Sacrifice.
Cette
musique extrême, qui a connu son heure de gloire au début des années 1990 avec
son explosion en Suède, perdra le 13 décembre 2001 un de ses géniteurs en la
personne de Charles « Chuck » Schuldiner, décédé d’une tumeur au
cerveau.
Olivier Saison
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire